Avoir un smartphone dégooglisé, c’est devenu facile

Quelle excuse aurez-vous à ne pas protéger votre vie privée numérique, maintenant qu’un smartphone entièrement dégooglisé s’achète sur Internet ? En quelques clics, vous vous libérerez de l’espionnage incessant et abusif de Google, Facebook et les autres, qui connaissent nos moindres dires, faits et gestes… et pourquoi pas à Noël ? Si vous ne prévoyez pas d’acheter, dégooglisez vous-même votre smartphone actuel. C’est faisable voire facile, je vous guide pour l’installation logicielle.

Lecture 18 minutes

Au secoouuurs, [voix éplorée], je sais que Google contrôle mon smartphone, est dans mes applis, mes mails, nous surveille, sait tout sur nous. Les gens en parlent autour de moi, à la télé, dans les journaux, on m’angoisse mais je ne peux rien y faaiiire, moi qui ne connais rien en informatiiiique… »

[Voix informée] « Mais non, en 2023 c’est devenu facile d’avoir un smartphone dégooglisé : on peut convertir son smartphone actuel, voire en acheter un tout prêt. Et ça marche très bien ! »

Je dirais même plus, vous pouvez accéder à une vie numérique plus saine et apaisée, sans dépendre de Google pour la moindre connexion réseau, sans subir le pistage, sans publicité sur Internet, sans crainte que Big Brother vous écoute en permanence. Vous vous sentirez plus maîtres de vos choix, ce qui vous libérera (en partie) de l’emprise de ces géants invisibles, les Facebook, les Huawei, les Amazon. Un poids de moins dans votre vie. C’est un sentiment agréable que je recommande.

Ça vous tente ? Allez, suivez-moi.

Pourquoi c’est un problème, un smartphone rempli de trucs Google ?

De grandes entreprises fournissent le système d’exploitation de nos smartphones : Android (projet initialement open source récupéré par Google), iOS (Apple) ou MIUI (Android version Xiaomi). Un système d’exploitation, ou « OS » pour Operating System, c’est un ensemble de programmes informatiques au cœur de l’appareil et qui dictent son fonctionnement. Comme Windows ou Mac sur les ordinateurs.

Le souci est que ces entreprises gagnent beaucoup d’argent à partir des données numériques, elles ont donc truffé leurs OS de fonctions récupérant des infos sur notre vie privée et sans notre consentement : où nous sommes, ce que nous achetons, quels sites Internet nous visitons, quel restaurant nous avons réservé… Le pire étant Google, qui grâce à Android vous géolocalise 340 fois en 24h, collecte une foule d’autres données et vous consomme 130 Mo par mois pour récupérer cela.

Google collecte vos données même quand vous n’utilisez pas ses produits

Vous le comprenez, outre grignoter nos batteries et nos forfaits, cela veut dire exposer la vie privée de milliards de personnes à quelques multinationales, ce qui leur confère un pouvoir immense. Perso, je vote contre, surtout quand on peut y faire quelque chose. Et voici quoi.

« Moi je ne fais que téléphoner avec mon smartphone, je ne transmets aucune donnée privée »

Désolé mais si ! C’est ça qui est terrible.

Vous échappez certes à la transmission active de vos données privées (je raconte ma vie sur WhatsApp, mes photos sont synchronisées sur Google Photos, je renseigne mon appli de suivi de grossesse…) mais pas à la transmission passive qui est intégrée au fonctionnement du smartphone : géolocalisation, accès réseau, identité de l’appareil…

Comme l’a montré cette même étude scientifique de 2018, « une grande partie des données collectées par Google le sont alors que l’utilisateur n’est pas directement impliqué dans l’un de ses produits. »

Si vous n’utilisez que SMS et appels, renoncez au smartphone ! Dépensez plutôt 30€ pour un bon vieux téléphone 2G basique, qui ne transmet rien via Internet puisqu’il n’y a pas accès.

« Un smartphone dégooglisé, c’est un truc alternatif qui marche mal, non ? »

Un smartphone dégooglisé

FAUX ! C’est simplement un smartphone Android auxquels on a retiré toutes les saletés cachées des logiciels Google. Vous obtiendrez par exemple un Fairphone 5 dégooglisé, un Asus Zenfone 8 dégooglisé, un One Plus 9 Pro dégooglisé… et même un Google Pixel 7 dégooglisé ! Pied de nez ultime.

Ça marche donc très bien. Voilà presque 3 ans que j’ai dégooglisé gratuitement mon Samsung Galaxy S9, je n’ai à me plaindre de rien. Ma batterie tient plus longtemps et je suis choqué quand je vois une pub affichée chez quelqu’un d’autre. Idem pour mes proches qui ont sauté le pas.

En réalité, à part quelques logos d’applis, et des pubs qui disparaissent, vous vous rendrez à peine compte du changement. Autant je n’aurai pas affirmé cela il y a 10 ans, autant en 2023 l’expérience utilisateur des solutions alternatives s’est grandement améliorée. La différence du dégooglisé concerne surtout la partie invisible de votre utilisation : vos données privées qui sont transmises … ou pas !

Dégoogliser soi-même son smartphone est facile sur certains modèles

Comment on obtient un smartphone dégooglisé ?

Il y a 3 possibilités.

– Facile, un peu cher : acheter tout prêt. Aucune excuse du style « un dégooglisé c’est plus compliqué », non : ça se fait en quelques clics. Je propose ci-dessous 2 fournisseurs français. Pensez-y pour vous, ou pour un cadeau – pourquoi pas à Noël !

– Moins facile, gratuit : garder son smartphone Android et y installer soi-même un nouveau système d’exploitation (un nouvel « OS »), comme j’explique ci-dessous. Plus de 200 modèles sont compatibles.

– Moins facile, moins cher : acheter un smartphone Android d’occasion voire reconditionné et y installer soi-même un nouvel OS. J’ai offert récemment un Samsung Galaxy S8 quasi-neuf, ça m’a coûté 180€ et 1h30 d’installation de l’OS.

Installer un OS alternatif est même facile pour certains modèles. Je l’ai déjà fait 4 fois, je vais vous tuyauter. Pas mal de gens ont sauté le pas avec satisfaction, par exemple , , , et . En 2015, déjà 50 millions de personnes dans le monde utilisaient l’OS alternatif « CyanogenMod » (remplacé depuis par LineageOS). Si vous avez un iPhone, désolé c’était un mauvais cheval : Apple a trop verrouillé ses appareils, impossible de changer l’OS. Soit vous changez de smartphone à sa mort ou sa perte, soit vous vous consolez en sachant que la collecte de données privées par Apple est moins abusive que celle de Google… sans être négligeable ! Et qu’un iPhone communique aussi à Google.

Le meilleur moment : quand vous changez de smartphone

Je rencontre beaucoup de gens convaincus que leur vie privée numérique n’est pas respectée, mais qui ont peur du changement. Voici quand passer à l’action.

Votre ancien smartphone est passé sous la roue d’un camion ou tombé dans les toilettes ? Vous venez de vous faire voler votre sac ? HOPOPOP, ne vous précipitez pas sur le premier smartphone venu, truffé de pisteurs et de pubs. Achetez donc un dégooglisé ! Il suffit de commander sur le bon site Internet (voir plus bas).

Sensibilisez aussi vos proches qui cassent ou perdent leur smartphone, c’est le moment le plus facile pour leur faire franchir le pas.

Autre moment : votre vieux smartphone commence à ramer, voire les mises à jour deviennent impossible. Ne le jetez pas ! Vous pouvez installer un OS dégooglisé qui prolongera la vie d’un smartphone datant jusqu’à 2013, de même que les gens installent Antix (distribution légère de Linux) sur les ordis trop vieux – et ça remarche. Bravo, vous lutterez ainsi contre l’obsolescence programmée.

Enfin, en toute saison et à toute heure du jour ou de la nuit, il vous suffira d’un peu de courage dans vos veines et d’un smartphone compatible, pour installer vous-même un nouvel OS (voir plus bas).

« Mais sans Google PlayStore, j’aurai zéro appli ? »

Toutes les applis du Google PlayStore resteront accessibles via d’autres magasins d’applis comme App Lounge, F-Droid ou Aurora, utilisables sans compte Google.

Mais il sera plus cohérent de n’installer que des applis respectueuses de votre vie privée. Je conseille notamment NewPipe au lieu de YouTube, Signal au lieu de WhatsApp, OsmAnd au lieu de Google Maps, Firefox au lieu de Chrome, Posteo ou Mailo plutôt que Gmail, etc. Changez, c’est pour votre bien et on s’habitue vite. Pour un panorama complet retournez voir mon article de solutions pour la vie privée numérique.

« Pourquoi je devrais changer d’applis ? J’ai la fleeeemme »

Pour ne pas … regoogliser… un smartphone dégooglisé !

Comme l’explique Gaël Duval, créateur du système /e/OS, dans un smartphone classique il y a « de nombreuses fuites de données à tous les étages de la fusée », l’OS étant l’étage le plus bas, les applis celui le plus haut – et l’utilisateur les choisit en partie. Ainsi, malgré votre nouvel OS, en installant n’importe quelle appli vous risquez de réintroduire vous-même des fuites de données privées. Un peu dommage, non ?

Pourquoi est-ce le cas ? Parce que les applis sont un excellent moyen de collecter des données privées. C’est pourquoi Google vous en met par défaut dans son Android. La plupart d’entre elles s’accompagnent de petits logiciels espions, les « pisteurs » (third-party trackers en anglais), qui sont de réels mouchards communiquant vos données de manière opaque et sans votre consentement.

Choisissez bien vos applis : vous risquez de regoogliser votre smartphone dégooglisé !

Les plus truffées de tels mouchards sont les plus anodines. Candy Crush Saga contient 9 pisteurs, Météo France en a 12, Marmiton 12, Le Figaro en a 17, amma (calendrier de grossesse) en a 25 !! Rien qu’en méditant avec Petit Bambou, votre appli active par exemple les pisteurs « Google Analytics » ou encore « Facebook login », qui renseignent sur votre utilisation, votre géolocalisation, etc.

Une étude scientifique de 2018 a ainsi identifié des pisteurs de Google dans 88% des applis mondiales et Facebook dans 42% ! On trouve aussi du Amazon, du Huawei (Chine), du Yandex (Russie) et parfois du Criteo (France). Ce n’est pas Météo France qui commandite d’avoir plein de pisteurs dans son appli, mais bien ces grandes boîtes qui incitent ou forcent les développeurs informatiques à y greffer leurs mouchards, source de données donc de profit.

Les magasins alternatifs vous indiquent le nombre de pisteurs dans chaque appli. Vous choisirez donc en connaissance de cause. Rassurez-vous : il y a plein de bonnes âmes par le monde, qui créent de applis performantes et à « zéro pisteur ».

« Ok, je l’achète où, mon smartphone dégooglisé prêt à l’emploi ? »

Voici 2 entreprises françaises qui en vendent en ligne. Chacune a développé son propre OS (système d’exploitation) open source, fondé sur LineageOS. « Open source », ça assure la transparence : n’importe qui peut télécharger le fichier source de cet OS et vérifier (avec quelques compétences) ce que fait exactement le code. Les deux incluent une précieuse fonction de visualisation et blocage des transmissions de données indésirables, pour une protection renforcée. Au démarrage de votre smartphone, lisez plus bas ma partie intitulée « Comment j’installe des applis dans /e/OS, et lesquelles ? »

  • iodé, sur iodéOS que je ne connais pas mais voir ce test. Smartphone neufs ou reconditionnés en France, avec les marques engagées Fairphone, Shiftphones, Teracube, mais aussi Samsung, Xiaomi, OnePlus, Google Pixel. À partir de 200€
    Avantages : carte du monde interactive montrant où vos données sont envoyées / option de contrôle parental (4€/mois) permettant de bloquer les sites pornos ou des réseaux sociaux pour un smartphone d’enfant
    (pour les geeks, code source ici)
  • Murena, sur /e/OS que j’utilise avec bonheur depuis 3 ans. Choix évolutif de smartphones neufs ou reconditionnés, en ce moment les marques engagées Fairphone et Teracube, mais aussi Google Pixel et leur propre marque Murena. À partir de 300€
    Avantages : une adresse e-mail et 1Go de stockage cloud gratuits / sur leur modèle Murena 2, un bouton physique pour déconnecter temporairement micro et caméra et empêcher tout piratage
    (pour les geeks, code source ici)
    Si LineageOS avait encore quelques fuites de données vers Google, /e/OS a résolu ce problème pour devenir totalement dégooglisé, selon une étude scientifique de chercheurs de Dublin et Edimbourg en octobre 2021 (iodéOS n’était pas testé).

Je mentionne aussi une initiative venue des États-Unis : Simple Phone, fondé sur SimpleOS avec un appareil minimaliste à 350€ [ajout du 21 déc 2023 : SimplePhone semble avoir changé de mains et ne pas garantir un bon respect de l’utilisateur, cf. commentaire en bas de cet article].

Attention, je n’appelle pas à acheter des smartphones ! Mon conseil serait d’ailleurs de conserver le vôtre et en changer l’OS, voire de vivre sans smartphone. Mais fatalement, nombre d’entre vous changeront d’appareil bientôt, donc autant vous orienter vers un choix facile qui fait une grande différence.

« Moi, je préfère installer un OS dégooglisé, je fais comment ? »

Vous pourrez télécharger et installer par exemple iodéOS, LineageOS, CalyxOS, postmarketOS, qui sont gratuits, ou SailfishOS qui est semi-payant.

Mais je vais vous parler de /e/OS, utilisé sur les appareils de Murena et que j’ai installé sur 4 smartphones. Derrière, il y a la fondation /e/, française, à but non lucratif. C’est selon moi l’OS plus adapté pour des motivé(e)s peu calé(e)s en informatique. Les bugs des débuts en 2018 ont été largement résolus et vous bénéficierez d’une grosse communauté via un forum, des gens très sympas et réactifs qui m’ont aidé dans mon installation et mon utilisation initiale.

Pour installer un OS, il faut un smartphone chargé, un bon câble USB, un ordi (Mac, PC ou Linux) qui soit à jour, connecté à Internet, et qui reconnaisse le smartphone via ce câble. Il faut peut-être une carte microSD avec son adaptateur ordi (j’en ai eu besoin 1 seule fois sur 4 ; voir plus bas). Il faut du temps devant soi – comptez 1 à 2 heures après rodage, mais envisagez plusieurs heures étalées sur plusieurs jours si c’est la première fois.

Dans les grandes lignes, vous allez :

1) enlever des verrous de sécurité de votre smartphone en réglant ses paramètres

2) télécharger sur votre ordi un gros fichier .zip de 1Go qui contient le nouveau système d’exploitation (OS) du smartphone, ainsi qu’un logiciel de récupération ou « custom recovery » (/e/OS vous proposera le sien mais je recommande fortement TWRP : Team Win Recovery Project) et peut-être un ou deux autres logiciels auxiliaires comme MiFlashTool (pour les Xiaomi), ou Odin, ou ADB.

3) passer le smartphone en mode ‘téléchargement’ (download)

4) y installer le logiciel de récupération via le câble USB

5) passer le smartphone en mode ‘récupération’ (recovery) en lançant ce logiciel

6) grâce au logiciel, effacer les données existantes du smartphone et y installer l’OS contenu dans le gros fichier .zip

7) démarrer votre vie dans un nouveau monde dégooglisé !

Avant toute chose, sauvegardez vos contacts, photos, documents, conversations importantes, qui seront effacés par l’opération. Ne les synchronisez pas avec un compte Google, vous voulez vous dégoogliser ! Transférez-les par câble USB vers l’ordinateur. Pour les contacts Android, faites la simple manip suivante : dans l’appli Contacts, allez à ‘Menu (les 3 barres) > Paramètres > Exporter > Exporter vers fichier VCF > Enregistrer’, ce qui crée un fichier .vcf dans le dossier Stockage Interne/Documents du smartphone, que vous pouvez copier sur un ordinateur via le câble. Ce fichier contient tous vos contacts. Une fois l’OS changé, vous pourrez charger ce fichier depuis l’ordinateur vers ce même dossier Stockage Interne/Documents du smartphone via le câble, puis dans l’appli Contacts faire ‘Menu > Paramètres > Importer > Fichier .vcf’, et choisir votre fichier, le tour sera joué.

À ce stade, ne vous ruez pas sur l’installation. Je devine que le désir brûlant de libérer votre smartphone fait battre votre cœur très fort, mais attention à la chose suivante.

Avant d’installer /e/OS, vérifiez le nom de code du smartphone. Tout appareil Android a un tel nom, qui est utilisé par les développeurs informatiques et non par le grand public. Vous ne le trouverez pas dans ‘Paramètres > A propos du téléphone’. Ce n’est pas le nom commercial (p.ex. ‘Galaxy S9’ de Samsung), ce n’est pas le numéro de modèle (p.ex. ‘SM-G960F’), ce n’est pas le numéro IMEI, mais un nom comme ‘starlte’ ou ‘lithium’. Assurez-vous de ce nom, car il y a une version d’OS par nom de code, et installer la mauvaise version est parfois fatal. Chez Sony, le Xperia XZ2 a pour nom de code ‘akari’ mais le XZ2 Compact s’appelle ‘xz2c’ et le XZ2 Premium s’appelle ‘aurora’, ils ont donc trois fichiers d’OS différents ; chez Xiaomi, un Redmi 7 (‘onclite’) ce n’est pas pareil qu’un Redmi Note 7 (‘lavender’)… La liste des appareils compatibles /e/OS affiche bien certains numéros de modèle comme ‘SM-G960F’, mais la méthode la plus sûre et simple pour trouver ce nom de code est de télécharger l’appli sans pisteur « Device ID » de l’auteur « CodeKiemCom » (et pas une autre, des applis semblables ont des pisteurs). Récupérez l’info « Device Codename » et désinstallez cette appli qui ne fait rien d’autre.

Dans cet exemple, l’appli affiche le nom de code : ‘starlte’

Maintenant, deux cas qui dépendent de votre modèle de smartphone :

Cas 1. Avec un peu de chance, votre appareil figure sur cette liste des modèles bénéficiant de l’assistant d’installation Easy Installer, développé par la communauté /e/OS. Par exemple pour des Fairphone, Samsung, OnePlus… cela concerne 21 modèles à ce jour, la liste s’allonge (si vous achetez un smartphone pour le dégoogliser, choisissez-le de préférence parmi ces modèles). Alors l’opération sera facile ! Voyez ce retour d’utilisateur enthousiaste. Téléchargez l’Easy Installer, petit logiciel qui vous guidera pas à pas, puis une fois l’installation de l’OS réussie, lisez plus bas ma partie intitulée « Comment j’installe des applis dans /e/OS, et lesquelles ? ». En cours d’installation vous verrez sur votre ordi ce genre d’affichage :

Cas 2. Sinon, regardez grâce au nom de code si votre appareil fait partie de cette liste des modèles compatibles avec /e/OS (il y en a 223 à ce jour), auquel cas l’installation est possible avec plus d’efforts et un peu d’anglais… ce que j’ai fait sans rien y connaître, donc vous pouvez y arriver ! Notez au passage qu’/e/OS prend en charge des modèles sortis entre 2023 et 2013, pas mal non ? Si votre modèle n’est pas dans la liste, osez demander de l’aide sur les sujets dédiés du forum ; j’avais ainsi eu la chance qu’une bonne âme me crée la version de l’OS adaptée au mien, indisponible à l’époque. Si votre modèle est dans la liste, préparez-vous à « rentrer dans la Matrice » en faisant des trucs comme ça, qui sont finalement assez marrants :

Dans ce cas 2, ayez conscience des risques. N’y allez pas la fleur au fusil comme moi à l’époque. Une fausse manip avait rendu mon smartphone inutilisable à jamais ou « briqué », car j’agissais sans comprendre. Vous allez retirer des verrous pour manipuler les couches logicielles les plus profondes du smartphone, donc vous pouvez faire des bêtises, pas de précipitation. Si comme pour moi alors, les termes « flasher une ROM », « recovery » ou « bootloader » ne vous évoquent rien, je recommande VIVEMENT la lecture préalable de ces quatre articles très didactiques : « Libérez votre smartphone » un, deux et trois, ainsi que « Recovery TWRP » sur ce logiciel que vous allez utiliser. Suivez en priorité les instructions spécifiques d’/e/OS (en anglais) et non celles-ci, mais ces quatre articles en français vous éclaireront grandement. Si j’avais eu ces infos la première fois, je n’aurais pas fait le douloureux apprentissage du smartphone briqué.

Bon, là je vous inquiète mais en vrai ça va bien se passer ! Et il vaut mieux risquer de perdre un peu de temps que perdre un smartphone…

Passez à l’installation proprement dite.

Si jamais vous avez un Samsung Galaxy S8 ‘dreamlte’, ou un Xiaomi Redmi Note 7 ‘lavender’ : chance ! Car j’ai déjà installé /e/OS sur ces deux smartphones et voici pour vous mes instructions et astuces détaillées.

Instructions pour Redmi note 7 ‘lavender’ (anglais)
Instructions pour Galaxy S8 ‘dreamlte’ (français)

Sinon, sur la liste des appareils compatibles, ouvrez votre page ‘Install doc’, qui vous indique notamment sur quelle combinaison de boutons appuyer pour passer le smartphone en mode Download ou en mode Recovery, ce sera important – c’est possible aussi en lignes de commandes, mais j’ai trouvé la méthode des boutons plus pratique. Puis dans le cadre ‘Command Line’ cliquez sur ‘Install’ qui ouvre la page d’instructions. C’est en anglais mais un traducteur en ligne comme DeepL sera votre ami.

Je ne déroule pas toutes les étapes, détaillées sur le site de la fondation /e/, mais je vous mentionne les trois principaux écueils.

Première difficulté, variable selon les constructeurs : déverrouiller (« unlock ») le chargeur d’amorçage (« the bootloader ») du smartphone. C’est un petit logiciel qui, au démarrage de l’appareil, choisit quel système d’exploitation lancer – comme le BIOS sur un PC, si vous avez déjà réalisé une installation Linux. Ce bootloader, par défaut, n’autorise pas un autre OS que celui d’origine, c’est pourquoi il faudra le déverrouiller avant de pouvoir lancer /e/OS. C’est facile sur un Samsung, un OnePlus ou un Google Pixel, moins facile sur d’autres. Sony peut vous réclamer un code à récupérer sur leur site. Xiaomi aussi, qui vous demandera un compte mail et vous fera attendre un délai incompressible de 7 jours, 2 jours … ou parfois 1 min avec de la chance. Anticipez donc cette étape.

Vous avez réussi à lancer TWRP

Deuxième difficulté : appuyer sur les boutons de votre smartphone (Volume +, Volume -, Power, etc.) assez vite, ou assez longtemps, ou au bon moment. Ça paraît bête, mais à chaque installation c’est là où j’ai le plus galéré. Peut-être serez-vous plus habile ! Le passage en mode Recovery est notamment critique, car il faut prendre de vitesse le smartphone qui tente de lancer le Recovery du constructeur (« stock recovery », qui n’autorise pas l’installation /e/OS), alors que vous voulez lancer le Recovery de TWRP (« custom recovery »). Restez calme si cette étape échoue, essayez une manière différente d’appuyer sur les boutons, appuyez à différents moments en fonction de l’affichage de l’écran, bref, persévérez. Pensez aussi à changer de version de TWRP en cas d’échec. Une fois que l’écran noir-gris-bleu de TWRP se sera affiché, bravo vous aurez fait le plus dur ! La suite est plutôt facile avec peu de surprises.

Ecran inquiétant mais normal

Troisième difficulté (éventuellement) : vous n’arrivez pas à transférer le gros fichier .zip /e/OS vers le stockage interne du smartphone (« Internal Storage ») car ce dossier n’apparaît pas dans TWRP. Il faut alors copier ce fichier depuis votre ordinateur sur une carte microSD (requiert un adaptateur), introduire la carte dans le smartphone puis, dans TWRP, choisir ‘Select Storage’ > ‘microSD’ au moment de l’installation de l’OS proprement dite (« flashing the ROM »).

Lors de cette installation finale, un écran inquiétant tout noir avec plein de lignes de texte et une barre de progression bleue s’affiche : ça dure plusieurs minutes et c’est normal. Il ne faut SURTOUT PAS débrancher le câble à ce moment, ou que le smartphone tombe en rade de batterie : il risquerait de se « briquer ».

Démarrage initial d’/e/OS

Après cela, cliquez sur ‘Reboot System’ pour redémarrer votre smartphone. Le logo constructeur s’affiche d’abord, puis… roulement de tambour… le logo de la liberté : un « e » blanc avec un petit point qui danse. Patientez, cela reste ainsi plusieurs minutes puis ça démarre. Félicitations, vous avez bel et bien dégooglisé votre smartphone ! Un bref sentiment de geekitude et de maîtrise du monde vous envahit alors : savourez-le. Suivez les quelques instructions de prise en main d’/e/OS, vous pourrez ensuite installer vos premières applis en prenant garde aux pisteurs (voir ci-après).

Dans l’ensemble, pour en arriver là, attendez-vous à mobiliser votre courage et votre débrouille : retenter les manips plusieurs fois voire depuis le début, parcourir le forum /e/OS, le forum XDA des développeurs de logiciels mobiles, à regarder des vidéos en anglais (souvent avec des accents indiens !), et parfois faire votre propre sauce avec des ingrédients glanés sur différents sites. Les instructions d’/e/OS sont en partie établies par des bénévoles comme moi, qui n’ont pas forcément le temps de tout détailler ou tester ou tenir à jour. Faites preuve d’indulgence et sachez rebondir.

« Comment j’installe des applis dans /e/OS, et lesquelles ? »

N’importe quelle appli du Google PlayStore peut s’installer, mais avant, vous allez y réfléchir à deux fois.

Car comme expliqué, installer une appli truffée de pisteurs de Google ou Facebook ou Amazon va en partie regoogliser votre smartphone, en permettant à ces entreprises de capter à nouveau certaines de vos données privées. /e/OS a beau fournir sa fonctionnalité « Advanced Privacy » bloquant les transmissions de données indésirables, perso plutôt qu’introduire un loup ligoté dans ma bergerie je préfère pas de loup du tout !

Vous téléchargerez vos applis depuis le magasin dégooglisé « App Lounge », intégré à /e/OS. En complément, car App Lounge n’a pas toutes les applis, vous pourrez installer le magasin Aurora Store, qui permet d’accéder au contenu du Google PlayStore de manière anonymisée et sans compte Google. Les deux vous affichent pour chaque appli un Score de Confidentialité, que vous pourrez consulter avant de l’installer. Citons aussi le magasin dégooglisé F-Droid, concentré sur les applications gratuites et open-source.

N’installez surtout pas Chrome !
Réfléchissez à quitter WhatsApp et Gmail

N’installez surtout pas Chrome, un des pires logiciels espions, au centre de votre utilisation d’Internet donc de vos données. Le navigateur fourni par /e/OS fonctionne très bien et bloque les pubs. Sinon installez Firefox.

N’installez pas WhatsApp, en tout cas pas avant de prendre conscience que cette appli qui appartient à Facebook inclut des failles de sécurité permettant à des gens qualifiés de prendre le contact total de votre smartphone à distance (contacts, photos, applis, navigation web, mails, messages…). Préférez l’appli Signal, qui a exactement les mêmes fonctionnalités mais protège votre vie privée. C’est le moment de convertir vos proches à Signal pour garder vos groupes… ou d’y renoncer !

Installez avant tout l’appli Exodus Privacy, qui recense les applis de votre smartphone en listant leurs pisteurs et leurs permissions (écrire sur la mémoire interne, accéder à votre géolocalisation…). Ce projet, porté par une association française, a grandement amélioré la transparence des applis Android. C’est d’ailleurs Exodus qui fournit à App Lounge et Aurora Store les scores de Confidentialité.

Le moteur de recherche intégré à /e/OS est peu performant, mais pensez aux alternatives au moteur de Google : DuckDuckGo, Lilo, SwissCows, Startpage, metager…

Ensuite, préférez OsmAnd à Google Maps, NewPipe à YouTube, etc. Réfléchissez à quitter Gmail pour un fournisseur respectueux comme Posteo, Mailo, Tutanota, j’en ai déjà parlé. J’avoue que quelques applis de base d’/e/OS ne sont pas terribles, par exemple Magnétophone –> c’est l’occasion de vous entraîner à chercher une appli équivalente bien notée et avec le moins de pisteurs possible !

À nouveau, parcourez mon article de solutions pour la vie privée numérique.

Grâce à Exodus et /e/OS, vous pouvez enfin VOIR les mouchards que vous risquez d’installer sur votre smartphone, vous abstenir et choisir d’autres applis. Ou du moins, accepter ces mouchards en connaissance de cause.

Si une appli qui vous semble nécessaire est truffée de pisteurs, essayez de passer directement par le site via votre navigateur Internet, cela produira moins de données. Typiquement pour les applis bancaires, qui ont toutes en moyennes 4 ou 5 pisteurs (1 seul pour Banque Postale, mais jusqu’à 9 pour N26).

En conclusion

Avoir un smartphone dégooglisé (ou pas de smartphone !) redonne de la tranquillité d’esprit, du repos cognitif (pas de pubs), de la liberté d’exposer ou non nos données privées sur Internet (réseaux sociaux, messagerie, etc.), du contrôle sur nos choix.

Avoir un smartphone dégooglisé, ce n’est pas sortir de la norme, mais au contraire retourner dans ce qui était et aurait dû rester la norme du numérique : liberté de l’utilisateur et respect de la vie privée.

Une fois ce petit effort fait, vous ne pourrez plus jamais repasser au monde anormal du smartphone googlisé, je vous l’assure !


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4 réflexions sur « Avoir un smartphone dégooglisé, c’est devenu facile »

  1. Je suis passé au murena one depuis maintenant 1 ans et malgré des débuts difficiles aujourd’hui cest que du bonheur. Jai installé vimusic, newpipe, antenna pod, transportr, signal, kmeet et ça marche très bien. Ma femme a reçu le sien depuis hier et ça lui plait plutôt bien

    Aimé par 1 personne

    1. Bonjour, à mon tour de faire un retour sur le Murena One (smartphone dégooglisé avec eOS préinstallé), qu’une de mes connaissances a acheté fin 2023.
      Points positifs : prix abordable 300€, bonne batterie, stockage 128Go confortable, synchronisation pratique avec le compte Murena (calendrier, notes, etc.)
      Points négatifs : un peu grand, pas de prise jack, peu de coques compatibles, photos mauvaises en basse luminosité

      Je viens de jeter un oeil à Vimusic que je découvre grâce à vous, ça semble être au top ! Pouvez-vous nous en dire plus ?

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  2. Bonjour Thomas,

    Super article de blog que je vais partager à mes proches et collègues pour bien commencer l’année 2024. Petit point par contre, SimpleMobileTools qui est derrière le SimplePhone est rachetée par ZipoApps, une société intégrant des pubs à ses apps, donc j’imagine pas mal de trackers aussi : https://www.reddit.com/r/SimpleMobileTools/comments/187w64x/simple_mobile_tools_bought_by_zipoapps/

    Merci en tout cas et bonne journée

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